Le 19 avril 2018, l’Union européenne a voté à Strasbourg une nouvelle législation en faveur de l’ouverture du marché des semences. Une révolution dans le monde agricole européen, puisque le terrain était jusque-là occupé par des multinationales comme Monsanto. Un accord qui est applicable depuis janvier 2021 et qui permet donc aux agriculteurs bio de vendre des graines issues de leurs propres récoltes. Pour Inès Trépant, politologue et auteure du livre « Biodiversité, quand les politiques européennes menacent le vivant », cette décision prouve que la législation évolue dans le bon sens. Pour Agatha Roubaud, de l’Université Populaire de Permaculture (UPP), « c’est un bon point, a priori, par rapport au combat qui est mené depuis plus de 40 ans sur le blocage des semences paysannes et l’hégémonie qui a été donnée aux lobbies de l’agroalimentaire et de la pétrochimie. On valorise la biodiversité, l’autonomie et la capacité à choisir et à qualifier des paysans ».
Des contraintes pour les agriculteurs bio
Pourtant, un décret publié en 1981 au Journal officiel a prohibé la vente des semences qui n’étaient pas enregistrées sur le catalogue officiel sur les semences autorisées, ce que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) n’a pas manqué de nous rappeler en juillet 2012. Le problème ici, est que pour inscrire une variété dans ce catalogue, une semence devait répondre à des critères de distinction, d’homogénéité et de stabilité, mais également proposer une amélioration par rapport aux variétés existantes lorsqu’il s’agit de plantes de grandes cultures. Pour s’inscrire, il faut aussi s’acquitter d’une somme comprise entre 6 000 € et 15 000 €. Un coût énorme pour les petits agriculteurs bio. Un montant que seuls les géants comme Monsanto-Bayer ou DuPont Dow pourront payer pour faire faire entrer leurs variétés dans ce catalogue.
Un espoir pour le marché des semences
Désormais, les agriculteurs devront déclarer la vente de leurs semences et envoyer un échantillon afin de garantir la non-contamination de leurs produits par des agents chimiques ou des engrais synthétiques. Pour Inès Trépant, la décision des eurodéputés est une victoire pour les producteurs, « ils vont enfin pouvoir échanger ces semences et les vendre, ce qui va leur permettre de développer des variétés de semences adaptées à l’agriculture biologique ». Mais selon le collectif Ifoam-EU, basé à Bruxelles « un nombre de points devait encore être clarifié afin de de s’assure que cette nouvelle réglementation soit applicable au travail quotidien de toutes les parties de la chaine de production du bio ». Les règles pourraient donc encore changer dans les années à venir pour le marché de l’agriculture biologique. Celle-ci représentait déjà une croissance une croissance annuelle de 12 % en 2016 et pourrait donc largement décoller en 2021, ce que nous espérons amplement.